Plusieurs milliers de manifestants ont tenu à continuer d'exprimer leur opposition à la loi travail, en dépit de son adoption durant l'été. Un baroud d'honneur diront certains observateurs, vu l'impression de résignation dans les esprits.
Même si l'été est passé, ainsi que la rentrée scolaire, réduisant les incitations à manifester, des personnes en ont fait abstraction pour défendre leur conviction au sujet de la loi travail. Une manifestation supplémentaire, ce jeudi 15 septembre. Sur Paris, le cortège s'est déplacé de la place de la Bastille à la place de la République, point de départ du mouvement Nuit debout, le 31 mars dernier. Entre 12.000 et 40.000 manifestants dans le cortège parisien, les estimations les plus basses étant meilleures que lors de la manifestation du 5 juillet. En vérité, ça devrait se rapprocher des 20.000 manifestants. Ce qui, pour une manifestation deux semaines après la rentrée n'est pas si ridicule que ça.
Prolongation des nouvelles habitudes
Mais avec une nouvelle manif contre la loi travail, revient ce qui est désormais un classique dans les manifestations en France en 2016. À savoir, une logique d'excitation mutuelle entre "casseurs" et forces de l'ordre - surtout les CRS -. Les premiers envois de gaz lacrymogène et de projectiles ont eu lieu sur le croisement du boulevard Beaumarchais et de la rue Saint-Sébastien, et ça n'a guère stoppé jusqu'à la place de la République, où ce fut même un festival durant plus d'une heure. Certes, ce n'était pas comme place de la Nation le 26 mai dernier, mais ça gazait suffisamment pour mettre les manifestants sur les nerfs.
Et comme toute nouvelle habitude dans les manifs, la tactique policière de la nasse fait également sa rentrée, afin de couper le cortège en plusieurs morceaux. Et gare à celui ou celle qui serait trop proche d'un CRS voulant charger sur la foule. Les coups de matraque partent sans coup férir! Tout comme les interpellations à même le sol et à plusieurs pour un seul manifestant. Un exemple de la "virilité" de fonctionnaires chargés de protéger et servir la population!
Une nouvelle série à prévoir?
Pour plusieurs observateurs, cette manifestation semble être inutile, étant donné que la loi travail est passée via l'article 49.3 de la Constitution et l'absence de motion de censure du gouvernement de Manuel Valls, fin juillet. Néanmoins, l'idée de nouvelles manifs pour inciter les autorités à "vider la loi de sa substance" est manifeste chez les leaders syndicaux, notamment Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT (cf lien n°1). Et son homologue de FO, Jean-Claude Mailly, n'exclut pas une piste juridique pour empêcher cette loi, prenant pour exemple le contrat première embauche voulu en 2006 par Dominique de Villepin, Premier ministre à l'époque, voté, promulgué mais pourtant abrogé par le président d'alors, Jacques Chirac.
De même que vouloir relancer des manifs sur ce sujet revient dans les esprits, il est également question de repeupler les assemblées générales (AG) de Nuit Debout. Il faut dire que le mouvement, lancé le 31 mars dernier, place de la République, a été victime de l'été et de la rentrée, avec une fonte quasi totale des activistes proposant des rassemblements quotidiens et hebdomadaires. Un constat d'échec très amer pour certaines personnes à l'initiative du mouvement, comme Frédéric Lordon, dans une longue interview au Bondy Blog (cf lien n°2). Cependant, l'économiste et philosophe estime que le mouvement a provoqué quelque chose "dans les têtes" des gens qui étaient "loin de l'événement", dont les effets ne peuvent pas être encore mesurables et mesurés en cet instant, mais à plus longue échéance.
Puis après tout, l'étincelle qui avait pris forme en avril, peut tout à fait retrouver une flamme puissante dans les prochaines semaines... d'ici là, wait and see.
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