Durant la manifestation du 28 avril contre le projet de loi travail, des scènes de violence ont éclaté entre forces de l'ordre et certains manifestants venus pour en découdre. Ce qui a été par la suite repris largement par les médias mainstream.
Le mouvement contre le projet de loi travail, appelé également projet de loi El Khomri, du nom de la ministre du Travail, Myriam El Khomri, continuer dans sa mobilisation. Néanmoins, il semble marquer le pas. Jeudi 28 avril, 170.000 à 500.000 citoyens ont battu le pavé dans toute la France, dont 14 à 60.000 à Paris. Comme d'habitude, la vérité se trouve à mi-chemin, entre les données du ministère de l'Intérieur et celles des syndicats, mais ça devient de moins en moins mobilisateur, notamment par rapport à la manifestation du 31 mars, qui reste la plus importante à ce jour, contre le projet de loi gouvernemental.
Compression des manifestants
L'une des raisons les plus évidentes de cet essoufflement est la multiplication des scènes de violence entre forces de l'ordre et des casseurs, largement relayées au niveau médiatique. Ces casseurs profitent du mouvement social pour faire des bris de vitrine, des saccages de voitures ou un déploiement des ordures sur la voie publique. En face, police et gendarmerie affichent une nervosité palpable depuis le début des manifestations, en mars. Mais dans la manifestation d'hier, ça a été le paroxysme.
Dans le cortège parisien, entre place Denfert-Rochereau et place de la Nation, le rythme de la marche n'était pas imposé par les syndicats mais par les CRS et les gendarmes. En outre, les fameux casseurs s'étaient positionnés en tête de cortège, avant les services d'ordre (ou de sécurité) des syndicats. Durant la manif, les forces de l'ordre faisaient tout pour stopper l'avancée de la tête de cortège, où des casseurs s'étaient positionnés; tandis qu'en queue, plusieurs témoignages affirment que ces mêmes forces de l'ordre poussaient les manifestants à accélérer le pas. Au fond, une tactique de compression, de provocation, fut délibérément mise en place par les fonctionnaires de police et de gendarmerie, de sorte que l'excitation chez les manifestants gagne du terrain. Par exemple, sur le boulevard Saint-Marcel (5e arrondissement), les CRS placés devant le cortège forçaient les gens à reculer pour encore plus compresser le mouvement.
Une excitation mutuelle
En gros, le cortège avançait 10 minutes avant d'être stoppé durant 15-20 minutes. Au pont d'Austerlitz (5e arrondissement), le cortège fut une fois encore stoppé et la tension monta d'un cran. Pour finalement aboutir à l'explosion de violence qui s'est faite après le passage de la tête de cortège au-delà du pont d'Austerlitz, sur l'avenue Ledru-Rollin (12e arrondissement). À partir de là, CRS et gendarmes isolèrent la tête de cortège du reste des manifestants, la mettant dans une nasse à ciel ouvert, de manière à pouvoir envoyer des gaz lacrymogène si nécessaire. Face à ce coup sournois, les casseurs, dont font partie les Black Blocks sont sortis de leurs gonds et se sont livrés à leur crétinerie habituelle (bris de vitrines, de carrosserie, ordures jetées sur la voie). Et dire que les Black Blocks se revendiquent de l'anarchisme! Mikhaïl Bakounine, Pierre Kropotkine, Élisée Reclus, Ericco Malatesta et d'autres penseurs anarchistes doivent se retourner dans leurs tombes!
Toujours est-il que du pont d'Austerlitz jusqu'à la place de la Nation, l'envoi de gaz lacrymogène par les forces de l'ordre fut systématique. ce à quoi les casseurs répondirent par les jets de bouteille en verre, ces "munitions" trouvées dans les poubelles. Forcément, ça fait des blessés de part et d'autre mais c'est lié à une excitation mutuelle qui prend en otage le reste des manifestants, surtout celles et ceux qui, apeurés, inquiets, se trouvaient pris entre deux feux.
Déconsidérer les manifestants
Bien évidemment, de nombreux médias, surtout les chaînes d'information en continu, se sont faits un grand plaisir de montrer les images des projections lancées de part et d'autre, afin de décrédibiliser les manifestants en les résumant à des casseurs ne cherchant qu'à se défouler. Et puis, ça permet pour la classe politique, dans son ensemble, de tirer à boulets rouges sur les syndicats et les manifestants, dans la pure tradition anti-syndicale made in France. Et pourtant, des journalistes, présents dans la tête de cortège, travaillant pour la presse écrite ou web, peuvent apporter un autre regard, issu du terrain. Mais comme dit le proverbe: "Une image vaut mille mots". Quand bien même celle-ci est parfaitement biaisée et qu'elle permet d'appliquer la morale des dominants à destination des dominés: "Il ne faut jamais prendre les gens pour des cons, mais il ne faut pas oublier qu'ils le sont."