Avec 15 victoires cette saison, le double champion du monde néerlandais a établi un nouveau record, facilité par l'agrandissement du nombre de Grand prix sur une année. Il n'en demeure pas moins impressionnant et déconcertant pour ses adversaires, qui devront trouver la parade pour l'an prochain.
On savait depuis le Grand prix du Japon que Max Verstappen est double champion du monde, confirmant son titre acquis dans la polémique en 2021. Mais le pilote néerlandais de Red-Bull/Honda a tenu à faire honneur à son rang en continuant une accumulation de victoires pour arriver à une 15e et dernière victoire au GP d'Abu Dhabi, clôturant la saison 2022 de Formule 1, longue de 22 GP. Certes, Verstappen a établi un record absolu de victoires en une saison, mais relativement au nombre de GP dans l'année, il reste en-deçà du record toujours détenu par Michael Schumacher en 2004 (13 victoires/18 Grand prix), année du 7e et dernier titre du "baron rouge".
Leclerc revanchard?
Il demeurait certains enjeux sur la fin de la saison et il est bon d'en parler. En premier lieu, qui serait le dauphin de Verstappen? C'est finalement le Monégasque Charles Leclerc (Ferrari) qui y parvient, sur le dernier GP à rester à cette place honorifique, devant Sergio Perez, coéquipier de Verstappen chez Red-Bull/Honda. Mais cette deuxième place au championnat pilotes, vu l'écart de points entre Leclerc et Verstappen, à l'avantage du second (146 points), montre la régularité du Néerlandais quand le Monégasque a montré des erreurs en piste, quand ça n'est pas son écurie qui commet des erreurs stratégiques indignes du prestige de Ferrari en F1. Peut-être que cela forgera un esprit revanchard chez Leclerc, plus exigeant envers lui-même et envers Ferrari, qui avait de quoi dominer Red-Bull en début de saison, mais dont le manque de développement, plus les erreurs de pilotage et de stratégie, ont coûté cher.
Un esprit revanchard que partagera sans doute l'écurie Mercedes. Dominante de 2014 à 2021, l'écurie allemande a loupé le changement réglementaire en début de saison avant de progressivement se refaire une certaine santé, comme l'atteste la victoire de George Russell au GP du Brésil, avant-dernier GP de la saison. Elle est d'ailleurs la première du pilote britannique en F1 et la seule de l'écurie Mercedes cette année. Ce qui traduit aussi une meilleure adaptation de la part de Russell face à Lewis Hamilton. Et pour la première fois dans sa carrière, le septuple champion du monde britannique termine une saison de Formule 1 sans avoir gagné au moins un GP et pour une rare fois, il termine derrière son coéquipier au classement pilotes, avec un abandon au dernier GP, sur problème mécanique.
Un autre pilote a abandonné sur problème mécanique sur ce dernier GP, c'est Fernando Alonso. De quoi tristement terminer son troisième cycle avec Alpine/Renault, après ceux de 2003 à 2006 et de 2008-2009. Et comme pour Hamilton, Alonso est derrière son coéquipier au classement pilotes; en l'occurrence Esteban Ocon. Signe que le pilote français a été plus fiable, quitte à être moins flamboyant en piste, que son illustre coéquipier espagnol. Ce qui a de quoi irriter l'animal politique Alonso, s'estimant lésé et davantage touché par les ennuis mécaniques, notamment au niveau du moteur, qu'Ocon. Sans oublier les accrochages entre les deux pilotes lors de la course sprint au Brésil, qui a provoqué une scène de ménages dans l'écurie française cherchant à assurer la quatrième place au championnat constructeurs face à McLaren/Mercedes. Finalement, la mission a été accomplie en raison d'une performance d'ensemble plus convaincante du duo Ocon/Alonso, tandis que Lando Norris ne put pas compter sur l'aide de Daniel Ricciardo, en perdition avec sa McLaren tout au long de la saison, excepté peut-être au GP du Mexique.
En tout cas, si la base est saine, Alpine va devoir muscler sa fiabilité, notamment au niveau du moteur Renault, même si les observateurs étaient prévenus du manque de fiabilité pour cette année, pour pouvoir assurer plus tôt son statut de quatrième force du paddock et rattraper les trois top teams l'an prochain, avec Ocon voyant arriver son compatriote Pierre Gasly à ses côtés, tandis qu'Alonso compte porter Aston Martin vers de plus hautes sphères pour 2023 et au-delà, à la place de Sebastian Vettel qui prend sa retraite.
Mais que faut-il penser de cette nouvelle ère de la F1? Le changement de réglementation, avec l'adaptation face au marsouinage, a obligé les écuries à se montrer ingénieuses pour réduire cet effet rebond. Et à ce compte-là, Red-Bull peut compter sur l'ingénieur Adrian Newey qui a su relever le défi efficacement. En tout cas, bien des craintes se sont peu à peu estompées. Le phénomène d'aspiration, qu'on pensait fortement réduit, ne l'a pas autant été que cela. Les voitures pouvaient se suivre sans que cela ne soit trop perturbant au niveau aérodynamique, ni trop accentuant la dégradation des pneus. Ce qui a donné lieu à des passes d'armes sympathiques, sans avoir forcément eu besoin du DRS (aileron arrière mobile) pour effectuer des dépassements.
Néanmoins, un gros bémol me vient à l'esprit, c'est la grande difficulté de disputer des courses sous la pluie! Est-ce lié au fait que les F1 aujourd'hui sont bien plus larges qu'auparavant? Est-ce qu'il y a une frilosité générationnelle chez nombre de pilotes? Est-ce lié à des pneus pluie qui n'assurent pas de la performance, ni une forte capacité d'évacuation de l'eau tombant sur la piste? Toujours est-il qu'il en ressort une certaine frustration. Surtout si, comme moi, vous suivez la F1 depuis au moins plus de 20 ans et que vous en avez vu des GP sous la pluie avec des voitures moins sûres pour l'intégrité physique des pilotes à l'époque. Et le semi-grand prix du Japon a montré que conduire sous la pluie ou sur une piste détrempée pouvait donner de bonnes batailles comme par exemple entre Leclerc et Perez ou entre Ocon et Hamilton. Charge à la Fédération internationale de l'automobile et à Pirelli, fournisseur de pneus de la F1 depuis 2011, de corriger le tir pour permettre des GP sous la pluie tout en assurant de bonnes conditions de sécurité pour les pilotes. Un équilibre bien fragile.
Vivement 2023!