L'annonce du profit record du géant pétrolier français pour l'année 2022 a de quoi relancer la question de la taxation des surprofits, tant la vague inflationniste, alimentée par la guerre russo-ukrainienne a généré des profiteurs grassement rémunérés.
La crise? Quelle crise? Pas pour Total en tout cas! Le groupe pétrolier français a dévoilé son bilan financier de l'année 2022, ce 8 février, et il en ressort un bénéfice record de 20,5 milliards de dollars. Soit 4,5 milliards de dollars de plus qu'en 2021, qui établissait le précédent record de l'entreprise. Et c'était pour le moins prévisible car en juillet dernier, au moment de la présentation des résultats du premier semestre 2022, j'avais émis l'hypothèse comme quoi Total verrait son bénéfice dépasser la barre des 20 milliards de dollars en 2022, avec l'effet de la guerre russo-ukrainienne sur le prix du pétrole et l'inflation qui en découle; sachant, par ailleurs, que la dépendance à la bagnole reste conséquente dans les pays développés (et ailleurs dans le monde), notamment pour le prolétariat.
Socialisation des profits de guerre
Est-ce que Total fait exception ou est-ce que le secteur pétrolier, dans son ensemble, se remplit les poches avec des circonstances hyper favorables? La seconde option est à valider car les autres géants pétroliers - Shell, ExxonMobil, Chevron, BP - affichent également des profits record pour 2022. Au total, les cinq majors du secteur ont enregistré 151 milliards de dollars de profits l'an dernier (cf lien n°1). Et tout porte à croire qu'en 2023, la tendance sera à la hausse, car la guerre russo-ukrainienne est partie pour durer et même quand elle cessera - un jour -, ses effets vont s'installer dans la durée car un ajustement à la baisse du prix du baril met plus de temps à se faire sentir à la pompe que quand il y a une hausse du prix, plus rapidement ressentie.
Ce qui remet au goût du jour la question de la taxation des profiteurs de guerre. Elle avait secoué les esprits durant l'été 2022 (cf lien n°2) et sa légitimité n'en est que renforcée. Ce qui, par ailleurs, rend le dépeçage (pardon, la réforme) des retraites moins nécessaire à faire passer de la part du pouvoir en France et dont l'opposition très large se fait jusque dans la rue ces dernières semaines. Et cela rend également légitimes les grèves opérées dans les raffineries durant le mois d'octobre et le fait que les salariés, syndiqués ou non, demandaient une part plus conséquente du gâteau ou bien des nouveaux postes à pourvoir. De même que les automobilistes ont de quoi paraitre les dindons de la farce tant ils sont contraints, en général, à utiliser la voiture pour pouvoir aller travailler et seraient à-mêmes de réclamer une baisse du prix à la pompe.
Bref, avec ce bénéfice record, l'appel à sa socialisation, quel que soit l'angle adopté - taxation; embauches ou hausses des salaires; ristourne à la pompe - est pleinement justifié et permettra, effectivement, de voir l'application de la théorie du ruissellement, tant vantée par le pouvoir actuel depuis plusieurs années. Mais agira-t-il de la sorte contre les firmes, dont il sert leurs intérêts (de classe)? Ce serait miraculeux.
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