Une fois de plus, les mass media se concentrent sur certains épisodes de violences durant la journée de mobilisation des gilets jaunes, samedi 22 décembre, pour discréditer le mouvement, notamment à Paris. Et ce, au risque de louper une partie qui révèlerait les provocations policières, dont la lâcheté n'est quasiment jamais condamnée médiatiquement.
Qu'est-ce qui a été retenu par les mass media au sujet de l'acte VI de la mobilisation des gilets jaunes, samedi 22 décembre? La violence supposée de ces derniers envers les forces de l'ordre (social). Et tout particulièrement sur l'avenue des Champs-Élysées, à Paris, où une dizaine de manifestants (minimum) a pris à partie trois policiers à moto, obligeant d'ailleurs l'un d'eux à braquer son arme, prêt à tirer si nécessaire. Une première série de vidéos prises sur place montre les choses sous cet angle et du coup, il est tentant de saluer le "sang-froid" des policiers face à des "casseurs". Et le pouvoir ne s'y trompe pas puisque le président Emmanuel Macron appelle "à l'ordre et à la concorde" suite à cette histoire.
Excitation mutuelle
Mais dans la soirée du 22 décembre, une version longue a été diffusée sur les réseaux sociaux et donne une lecture radicalement différente de celle qui prévalait jusqu'à présent. En fait, ce qui a rendu des gilets jaunes en colère, c'est que ces flics à moto avaient lancé plusieurs grenades de désencerclement, sans raison apparente, ni sommation préalable, auprès d'une foule qui dévalait les Champs-Élysées calmement. D'ailleurs, au moment même où les grenades sont lancées, un vélo passe.
VIDÉO - Un policier sort son arme à feu alors que des motards de la police sont attaqués sur les #ChampsElysées : nouvelles images de la scène. #GiletsJaunes #ActesVI pic.twitter.com/j8vpLuMbCK
— Clément Lanot (@ClementLanot) 22 décembre 2018
La scène dans sa totalité.#ActeVI #GiletsJaunes pic.twitter.com/F0KXGFrUGS
— Stéphanie Roy (@Steph_Roy_) 23 décembre 2018
De quoi se dire, en réalité, qu'il s'agit d'une violence policière qui s'inscrit dans une logique d'excitation mutuelle entre manifestants et forces de l'ordre (social). Ce n'est pas la première fois que je parle ici d'excitation mutuelle. J'en faisais mention au printemps 2016, vu ce que j'avais observé lors du mouvement contre la loi travail et la répression qui était opérée par le pouvoir en place (président François Hollande, Premier ministre Manuel Valls), dans lequel figurait encore un certain... Macron. C'est dire si l'actuel locataire de l'Élysée a retenu la leçon en matière de répression d'un mouvement social.
Et cette répression va extrêmement loin, avec les milliers d'interpellations, de gardes à vues faites ces dernières semaines sur l'ensemble de la France, ou bien du vol purement et simplement comme sur la vidéo suivante, où un CRS s'en prend à une femme et en profite pour lui piquer son gilet jaune et son sac à dos. Et dire que les violences faites aux femmes font partie des priorités du quinquennat de Macron...
Ce qui est visible avec le traitement médiatique des gilets jaunes, c'est qu'il verse dans le dénigrement, du moins dans le secteur de l'audiovisuel. Pourquoi préciser cela? Parce qu'il génère un impact fort au sein de la population, par rapport à la presse écrite qui est tombée en désuétude, mais se retrouve concurrencé par Internet. Néanmoins, ce n'était pas si évident. Peu avant la première manif (17 septembre), les mass media avaient un regard paternaliste, ou un tant soit peu empathique à l'égard des gilets jaunes, certains éditorialistes comme le sinistre Éric Brunet (RMC; BFMTV) arborant un gilet jaune. Mais vu l'évolution du mouvement, l'hostilité de leur part devient palpable et les diffusions d'images sont concentrées sur la violence, supposant qu'elle ait du seul fait des gilets jaunes ou des casseurs, agissant avec "lâcheté", se lamentait un commissaire face aux images sur la place de l'Étoile le 1er décembre dernier, dans l'émission "C à Vous" du lundi 3 décembre. Cette même émission ayant pris soin de ne pas diffuser d'image du passage à tabac d'un jeune d'origine maghrébine par une dizaine de CRS, ce même 1er décembre, afin que ce commissaire ne soit pas pris en contradiction face à la "lâcheté" de ses collègues CRS.
À vouloir minorer la violence institutionnelle, on alimente un feu insurrectionnel.