Depuis une quarantaine d'années, et encore plus depuis la crise des subprimes, où les États furent à la rescousse des marchés financiers, le déficit public est une obsession pour les gouvernements européens, quelle que soit leur bord. Et notamment en France, où le déficit public est chronique. Du coup, les orthodoxes en appellent à des réductions de dépenses publiques tous azimuts, sans préciser lesquelles et dans quel secteur, à l'heure où le budget 2015 est en question.
Impôt versus cotisations sociales
La principale dépense publique se situe dans la Sécurité sociale. Par conséquent, c'est là où est le cœur du déficit public. Il faut dire que l'administration de Sécurité sociale a pour principale ressource les cotisations sociales des salariés et des employeurs, en vertu du régime par répartition (les cotisants d'aujourd'hui paient pour les actuels retraités) pour financer de multiples assurances ou allocations (maladie, chômage, vieillesse, famille, etc.); même si l'impôt devient de plus en plus important depuis les années 90, avec la Contribution sociale généralisée (CSG), créée à cet effet. Mais le "trou de la Sécu" a pour principale origine la montée du chômage, qui voit l'administration bénéficier de recettes amoindries, car moins de cotisants, et la pousse à augmenter les dépenses de l'assurance chômage. La dite assurance chômage qui pourrait subir une nouvelle transformation.
Le modèle social français, pourtant si envié dans d'autres pays développés tels les États-Unis ou le Royaume-Uni, a un problème fondamental. La majorité des ressources viennent de certains citoyens et la majorité des dépenses doit subvenir à tous. En outre, le poids des cotisations sociales (effectives) est historiquement fort en France puisqu'elles représentent 17% du PIB en 2012, un record dans l'Union européenne, d'après les données d'Eurostat. Sachant que l'ensemble des prélèvements obligatoires en France fait 47% du PIB pour la même année, il en résulte que 36,2% des recettes publiques (hors entreprises publiques ou actions d'entreprise détenues par l'État) sont issues des cotisations sociales. Signe d'une dépendance des cotisations sociales non négligeable en France, mais elle est plus importante en Allemagne et aux Pays-Bas (respectivement avec 37,7 et 40,4% des prélèvements obligatoires).
Réforme fiscale
Si on se souvient de la campagne présidentielle de 2012, le candidat du Parti socialiste (PS), François Hollande, avait programmé une réforme fiscale, avec notamment une fusion de l'impôt sur le revenu avec la CSG, de manière à rendre une fiscalité plus progressive, plus redistributive. Or, cela est toujours attendu par les citoyens et les entreprises, et vu le récent abandon de l'écotaxe par le gouvernement de Manuel Valls, c'est pas demain la veille qu'elle sera mise en place. Par conséquent, la redistribution passe par la Sécu, qui bat de l'aile, avec sa dépendance aux cotisations sociales.
Mais ce qui est sidérant avec le gouvernement actuel, comme avec les précédents, issus de l'ancienne majorité Union pour un mouvement populaire (UMP), c'est l'indécision qui prédomine. Une tentative de réforme, sans que ça suive une même finalité, et du monde dans la rue. Mais là où l'UMP le faisait pour une minorité, le PS cherche à agir pour la majorité. Seulement, pour l'un comme pour l'autre, à force de surplace et d'annonces toutes faites sans concrétisation dans le réel, on finit par ne plus convaincre personne. D'ailleurs, le "ras-le-bol" fiscal bassiné depuis 2013 ne s'explique pas par la volonté des citoyens ou des firmes de ne pas payer plus d'impôts. Mais par la nécessité d'observer une concrétisation d'une amélioration suite à cette demande d'effort supplémentaire. Et comme cela n'est pas perceptible, effectivement, ça pousse à ne plus consentir à payer des impôts, taxes et cotisations sociales.