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JoSeseSeko

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"Il ne faut jamais prendre les gens pour des cons, mais il ne faut pas oublier qu'ils le sont." Cette phrase résume une recherche de vérité, de développer de l'information sur une variété de sujets, notamment l'économie, la politique et l'histoire. Et ce, dans plusieurs pays du monde.


Aux héros de l'Affiche rouge, la patrie reconnaissante

Publié par JoSeseSeko sur 21 Février 2024, 11:25am

Catégories : #Histoire, #France, #Résistance, #39-45, #PC, #Communisme

Photo: Flickr/kitchener.lord

Photo: Flickr/kitchener.lord

80 ans après leur exécution par les nazis, les résistants communistes de l'affiche rouge sont honorés par l'entrée au Panthéon d'une de leur figures, Missak Manouchian. Un moment solennel dont l'extrême-droite veut en profiter pour tenter de se blanchir, quitte à polluer l'ambiance.

"Vingt-et-trois étrangers et nos frères pourtant". Ce vers du poète Louis Aragon dans son poème Strophes pour se souvenir, publié d'abord dans l'Humanité en 1955, puis dans le recueil Le roman inachevé un an après et mis en chanson par Léo Férré au début des années 1960, résume le degré de reconnaissance que méritent les 23 résistants communistes du groupe Manouchian-Boczov-Rayman, groupe membre des Francs-tireurs et partisans - Main d'œuvre immigrée (FTP-MOI), fusillés par les nazis au Mont-Valérien le 21 février 1944, il y a 80 ans. Du moins 22 d'entre eux car la 23e membre du groupe, Olga Bancic, la seule femme comptant parmi ces résistants, fut décapitée en mai 1944 en Allemagne. Et 80 ans plus tard, celui qui fait office de meneur de ces fusillés de l'Affiche rouge, Missak Manouchian, entre au Panthéon, avec son épouse Mélinée, honorant la mémoire de ces résistants immigrés "morts pour la France".

Distinction du bloc

En tout cas, le destin de Missak Manouchian fut marqué par la tragédie. Arménien de naissance (1906), il survécut au génocide arménien de 1915-1916, en pleine première guerre mondiale. Un génocide opéré par l'Empire ottoman, allié de l'Empire allemand à cette époque. Il se réfugia en France en 1924, s'engagea au Parti communiste français (PCF) en 1934, année de sa rencontre avec Mélinée Assoudourian, sa future épouse. Emprisonné au début de la guerre puis engagé volontaire dans l'armée française, il milita dans la clandestinité au début de l'Occupation avant de rejoindre la FTP-MOI parisienne en 1943, menant diverses actions (attentats, sabotages), avant de se faire arrêter avec d'autres membres des FTP-MOI en novembre 1943, tandis qu'en parallèle sa femme Mélinée fut cachée par les parents du chanteur Charles Aznavour.

Au-delà de ce bref rappel biographique, cette panthéonisation des Manouchian décidée par le président Emmanuel Macron, vise à faire une distinction par rapport aux autres fusillés de l'Affiche rouge. Or, ce groupe formait un bloc, dont Manouchian en était un élément. D'ailleurs, jusque dans le début des années 1950, il était question du groupe "Manouchian-Boczov-Rayman", avant que l'on mentionne seulement Manouchian (cf lien n°1). Pourquoi? Il faut aller voir du côté du PCF de l'époque, où une purge visa les anciens résistants comme Charles Tillon ou André Marty, en raison de la politique de l'Union soviétique où Joseph Staline tint à effacer les figures locales des mouvements de résistance communiste au nazisme et que l'antisémitisme soviétique gagnait du terrain. Et le PCF, inféodé à Moscou en ce temps-là, obéit pleinement, effaçant de la mémoire collective les autres leaders que furent Joseph Boczov et Marcel Rayman car il s'agissait de résistants communistes juifs (Boczov juif hongrois et Rayman juif polonais). En outre, c'était une époque où le roman national autour de la Résistance voulait que les Français fussent majoritairement des résistants et le poète Aragon, dans un premier temps, chercha à minorer en préfaçant en 1951 un livre sur les lettres de communistes fusillés, expurgeant celles des FTP-MOI de l'Affiche rouge pour ne pas montrer l'importance prise par les immigrés dans la Résistance puis la Libération de la France.

Toujours est-il qu'au-delà de Manouchian, de Boczov ou Rayman, les autres membres du groupe de résistants communistes ne sont pas à oublier. En l'occurrence Bancic, déjà citée, Celestino Alfonso, Rino Della Negra, Cesare Luccarini, Thomas Elek, Maurice Fingercwajg, Spartaco Fontanot, Jonas Geduldig, Emeric Glasz, Slzama Grzywacz, Léon Goldberg, Stanislas Kubacki, Armenak Manoukian, Antoine Salvadori, Willy Schapiro, Amedeo Usseglio, Wolf Wajsbrot, Georges Cloarec, Roger Rouxel, Robert Witchitz. Les trois derniers noms cités étant des résistants français.

Récupération

Cette panthéonisation intervient dans un contexte où le camp de Macron veut chercher à se distinguer du Rassemblement national (RN), qui semble être en mesure de sortir en tête au moment des élections européennes prévues le 9 juin. Ce qui n'est pas chose aisée, tant le pouvoir n'a eu de cesse de donner des gages au parti d'extrême-droite, héritier de la collaboration à l'Allemagne nazie, à travers la loi immigration votée grâce à l'apport des 88 députés RN en décembre, marquant une "victoire idéologique" de ce dernier. Bref, une contradiction totale avec les actes de résistance du groupe Manouchian-Boczov-Rayman, en effaçant par ailleurs leurs convictions communistes pour mieux en faire une récupération politique (cf lien n°2).

Et les annonces du camp de Marine Le Pen de faire acte de présence durant cette cérémonie montre à quel point l'extrême-droite peut tout se permettre, notamment masquer sa propre histoire en indiquant rendre hommage. Ce qui ne passe pas auprès des descendants des résistants communistes, notamment chez les familles des membres de l'Affiche rouge (cf lien n°3).

C'est dire le crachat fait à leur mémoire par le pouvoir et l'extrême-droite!

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